avril 25, 2024

Procès des attentats du 13-Novembre : témoigner ou oublier, le dilemme des victimes

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Le 8 septembre s’ouvrira le procès des attentats ayant visé le Bataclan, des terrasses d’établissements parisiens et Saint-Denis. Les victimes et les proches des défunts préparent cette échéance à leur manière, entre fébrilité et appréhension.

Certains se sont abstenus de poser des congés d’été pour pouvoir être présents aux audiences. D’autres, au contraire, ne veulent pas en entendre parler. A l’approche du procès des attentats du 13 novembre 2015, qui s’ouvre mercredi 8 septembre, les victimes préparent cette échéance historique à leur manière, entre fébrilité et appréhension. Ce procès monumental, entièrement filmé, sera le point d’orgue de six ans d’une longue instruction à la suite des actes terroristes les plus meurtriers commis sur le sol français. Il rassemblera 20 accusés, 330 avocats et près de 1 800 personnes physiques ou morales qui se sont constituées parties civiles.

Parmi ces dernières, beaucoup ont encore du mal à évaluer leur degré d’implication dans les mois à venir. Selon les estimations de la cour d’appel de Paris, environ 300 personnes devraient venir déposer à la barre, un nombre équivalent à celui des parties civiles venues visiter la salle d’audience en juin. « La plupart de ces personnes ne savaient pas combien de temps elles allaient venir, ni si elles allaient témoigner. J’imagine qu’elles ont dû encore y réfléchir tout l’été », explique Julien Quéré, magistrat au cabinet du premier président de la cour d’appel, qui a organisé la visite et remis les badges, avec un tour de cou vert pour ceux qui acceptent de parler à la presse, rouge pour ceux qui refusent.

Frédéric Bibal, qui représente avec son cabinet une cinquantaine de victimes, constate qu’il y a « une forme d’inconnu » face à ce procès inédit, « y compris pour les professionnels aguerris ». « Ça peut générer de l’angoisse, décuplée chez les victimes. » « Certains ne veulent pas être à Paris pendant les moments forts du procès : ils ont besoin d’être le plus éloigné possible des faits. »

Selon Frédérique Giffard, avocate de 15 survivants et proches endeuillés, dont quatre personnes présentes au bar La Belle Equipe, certains « fuient la couverture médiatique et ne veulent même pas recevoir des mails d’informations générales ». Le psychiatre Bruno Boniface a lui aussi observé des craintes grandissantes chez cinq de ses patients, victimes des attentats, à l’approche du procès. Il y a le regret que les auteurs des tueries ne soient pas présents, puisque les membres des commandos sont tous morts, à l’exception de Salah Abdeslam. Le médecin évoque aussi la perspective des plaidoiries de la défense : « L’un d’eux m’a dit : ‘Si leurs avocats minimisent ce qu’ils ont fait, ça va être insupportable’. »

Pour celles et ceux qui choisissent de témoigner, les interrogations se bousculent. La psychologue Carole Damiani, qui dirige l’association Paris Aide aux victimes, liste quelques-unes de ces questions : « Est-ce que je vais arriver à ne pas me mettre en colère si je vois les accusés ? » « Tout le monde va dire la même chose, est-ce que ça ne va pas faire trop ? »

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